dream team ••• melchior

La monotonie du mouvement balancier enveloppe mon corps d’une douce transe dans laquelle je me laisse volontier emporter. C’est doux, ça a l’étrange saveur du bonheur ; à chaque fois que mes pieds décollent j’ai l’impression d’être libéré d’un poids supplémentaire. Sincèrement, pourquoi les plus merveilleuses des inventions sont toujours destinées aux enfants ? Soudaine pensée contrariante qui envahit mon esprit, alors je me propulse encore plus haut d’un coup de pied bien placé sur le sable.

J’ai les yeux fermés, ça stimule les sensations. Mais très vite je suis rattrapé par la nausée dans ma gorge qui me force à ralentir le rythme. Avant, arrière, jusqu’à l’arrêt. Soupir. J’ouvre les yeux pour apercevoir Heather qui continue de se balancer doucement, et comme sa tête est ailleurs je ne la dérange pas. Je sais qu’elle ne goûte pas à cette quiétude tous les jours, et après tout c’est bien elle qui a eu la bonne idée de prendre la balançoire des gosses. Ou plutôt non, on a attendu notre tour comme tout le monde, parce que nous aussi on est de grands enfants rongés par le besoin de s’amuser.

J’étais en train d’enlever le sable dans mes baskets quand le bruit insupportable de la seconde balançoire cessa, nous laissant tous les deux là, dans un silence confortable. Avec Heather il n’y a pas de moments embarrassants, c’est bien une de ses meilleures qualités. Mais c’est toujours pour mieux préparer la prochaine explosion, lancer à la volée des dynamites et s’extasier devant les feux d’artifices. Des sons sortent de sa bouche, j’enregistre à peine. Je jette un coup d’oeil vers les visages gris des adultes, des passants, des enfants. Maintenant qu’on ne se balance plus, le paysage me semble bien morne. Mais mon regard flâneur continue sa route jusqu’à se poser sur un groupe d’adolescent un peu plus loin, le seul autre présent ici. Visiblement, ce sont tous des hoomains un peu moins âgés que nous.


Je lève le doigt vers ladite direction en guettant une réaction sur le visage de mon amie. Mes iris rouges se fixent sur les siens, patients, jusqu’à ce qu’elle se tourne à son tour pour me regarder. Dans un regain d’énergie soudain, mon visage s’illumine ; parce que j’ai compris, elle a compris. On se ressemble beaucoup Heather et moi. Et surtout le courant passe bien, donc ça donne cours à des équations géniales quand on traîne ensemble. Alors que j'étais toujours assis sur la balançoire, je commence à étirer mes membres engourdis avant de me lever.